De plus en plus de parents sont aujourd’hui attentifs aux difficultés de succion de leurs nouveau-nés. Celles-ci sont plus flagrantes lorsque la maman allaite le nourrisson. Un problème de frein buccal restrictif en est régulièrement la cause. La chiropraxie s’intéresse particulièrement aux freins restrictifs : frein de langue, de joue, de lèvre.
Origine embryologique
C’est entre la 9ème et la 12ème semaine de vie in-utéro que la langue se dissocie du plancher buccal. Dans certains cas cette apoptose ne se réalise pas complètement. Il se produit alors ce que l’on nomme une ankyloglossie, c’est-à-dire un frein de langue court, ayant pour conséquence une diminution des mouvements de la langue.
Qu’est ce qu’un frein ?
Il existe plusieurs sortes de freins : les freins de langue, de lèvre et de joue.
1. Le frein de langue
Le frein de langue est cette fine membrane située sous la langue, attachée à la mâchoire inférieure, au niveau du plancher buccal. Cette membrane, présente chez tout le monde, ne doit pas être trop courte ou trop serrée. Lorsque cela arrive, la mobilité de la langue s’en trouve fortement diminuée.
Il existe plusieurs formes de sévérités dans les freins de langue. Les freins problématiques sont classés en 4 types : les trois premiers sont des freins dits « antérieurs » car ils se fixent sur moitié antérieure de la langue. Le dernier, plus difficile à détecter, est dit « postérieur » car il se fixe sur la deuxième moitié de la langue. Le type I, le plus connu et le plus reconnaissable se caractérise par une langue en forme de cœur. Le type IV, quant à lui, est très souvent épais et massif. Les types deux et trois ont des caractéristiques intermédiaires.D’après des études, les freins antérieurs concerneraient entre 4 et 11% de la population et les freins postérieurs entre 30 et 40% !
2. Le frein de lèvre
Ils relient la gencive supérieure à la lèvre supérieure en partant du dessus des incisives. Les freins de lèvres sont de quatre types dont deux sont problématiques et peuvent entraîner une ankyloglabie ou restriction du mouvement de la lèvre supérieure du bébé. Les freins de lèvres restrictifs sont plus rares mais très souvent associés à des freins de langue problématiques.
3. Le frein de joue ou frein buccal ou frein maxillaire
Peu connu et encore plus rare, ce type de frein part de la joue et rejoint l’os maxillaire. Lorsqu’il pose problème, il accentue les tensions au niveau de la lèvre supérieure.
Quels sont les signes d’alerte en lien avec un frein restrictif ?
Les signes chez le bébé
– un bébé qui refuse le sein
– un problème de déglutition
– une absence de prise de poids chez le bébé
– une durée excessivement longue de tétée (la tétée doit durer 30min au maximum)
– un bébé qui s’agite au sein et semble frustré
– tendance à refermer ses gencives sur le mamelon au lieu de téter
– un bébé qui bave beaucoup
– un bébé qui semble avoir des reflux (dû à une langue non étanche qui crée de l’aérophagie)
– bébé dort la bouche ouverte
– un bébé qui a des problèmes de sommeil ou semble fatigué
– un bébé qui déglutit en amenant sa tête vers l’avant
– un mauvais positionnement de langue, qui se trouve au niveau du plancher buccal et non au palais
– du lait qui reste présent sur les incisives après la tétée
Les signes chez la maman
– une douleur importante au mamelon lorsque bébé tête
– des crevasses
– des infections
– une baisse de la lactation
– des tétons en forme de rouge à lèvre juste après la tétée
– une sensation que bébé pince ou mord plutôt qu’il ne tête
Ces signes, s’ils sont souvent révélateurs d’un problème de frein, n’en sont pas systématiquement la preuve.
Les autres problèmes qui peuvent être en lien avec un frein restrictif
– Problème avec les voies ORL à répétition. En effet, la langue du bébé reste collée contre le plancher buccal au lieu du palais. Son placement est incorrect. De ce fait, la respiration du bébé ne sera pas nasale mais buccale, ce qui a pour conséquence une mauvaise filtration de l’air inspiré.
– Problème lors du passage à l’alimentation solide
– Problème de langage, avec une difficulté à prononcer certains sons
– Déformation du palais avec un palais en forme de V
– Dysfonctions au niveau de la base du crâne (occiput et atlas) pouvant même entraîner des plagiocéphalies ou des syndromes de KISS (kinetic imbalances du to subbocipital strain)
– Possiblement, énurésie persistante (âge > 6 ans)
Que faire en cas de frein de langue restrictif ? Faut-il forcément le couper ?
Les freins buccaux sont présents chez tous les individus. Reste donc à savoir s’ils sont restrictifs et gênent le bébé, l’enfant, ou l’adulte.Après une observation clinique ayant permis la détection d’un problème de frein, une prise en charge non invasive peut être proposée. Lorsque les résultats de cette prise en charge sont insuffisants, une intervention chirurgicale pour relâcher ce frein restrictif doit être envisagée.
1. La détection.
Lorsque le bébé pleure, sa langue doit s’élever à plus de 50% de la hauteur de sa bouche.Lorsqu’il tire la langue, sa langue doit dépasser ses gencives.A plus de trois mois, bébé doit pouvoir amener sa langue du côté de sa joue lorsque l’intérieur de celle-ci est stimulé.La force de la succion doit être normale.La langue de bébé ne doit pas « claquer » pendant la tétée.
2. Prise en charge non invasive.
– Les chiropracteurs ayant suivi une formation spécifique peuvent proposer des exercices de rééducation et d’assouplissement de la langue en complément d’un suivi global et, au besoin, orienter vers un professionnel de santé habilité.
– Une conseillère en lactation peut être consultée si la maman allaite pour un avis complémentaire.
– Un kinésithérapeute spécialisé en rééducation oro-maxillo-faciale peut également être consulté.
3. Frénectomie si nécessaire.
Traitement chirurgical : la frénectomie (ou frénotomie si la section est partielle)
Cette intervention chirurgicale a pour objectif de libérer le frein de langue, de lèvre et parfois de joue lorsque ceux-ci sont trop serrés et qu’ils empêchent la bonne mobilité de la langue.
Les freins problématiques sont souvent pris en charge dès la naissance à la maternité. Toutefois, s’ils ne sont pas détectés, la frénectomie peut être réalisée plus tard par un médecin ORL ou par certains dentistes.
Le relâchement des tensions buccales est souvent immédiat. La section est quasi indolore (on la sent moins que de se faire percer les oreilles). Juste après la section, le bébé peut téter. Toutefois certains bébés auront besoin qu’on les encourage à bien tirer la langue avant de téter. La cicatrisation est rapide en 2 ou 3 semaines et se déroule souvent très bien, notamment à l’aide de la salive et du lait maternel, qui jouent un rôle antiseptique.
De même qu’avant l’opération, des exercices de rééducation seront indispensables pour gagner de la mobilité au niveau de la langue.
C’est pendant la durée de la rééducation et de la cicatrisation que le travail des parents et des professionnels ont toute leur importance.
L’objectif est que la cicatrice se referme dans une meilleure disposition tout en laissant les tissus souples et relâchés pour une bonne mobilité de la langue.
Des tensions corporelles de compensation peuvent réapparaître quelques jours après la section du frein. Un chiropracteur, par son approche globale, pourra vous aider.
Le rôle du chiropracteur et de la chiropraxie sur un frein de langue
En chiropraxie, un frein de langue restrictif représente un problème. Mais le chiropracteur n’est pas initialement formé pour détecter les freins buccaux restrictifs. Il n’est pas non plus habilité à émettre un diagnostic concernant un frein restrictif. En effet, Il est important de préciser que la chiropraxie ne soigne pas un frein de langue restrictif.
En tant que chiropracteure formée aux conséquences multiples des freins restrictifs, cette étape de vérification de mobilité de la langue est aujourd’hui intégrée dans mes séances avec les bébés. L’objectif est de s’assurer que cette langue bouge correctement.
En effet, un frein buccal restrictif non détecté va limiter le bénéfice des consultations chiropratiques car la racine possible des problèmes du bébé est toujours présente.
A titre d’exemple, si un frein de langue restrictif est présent, alors toute la chaîne des fascias antérieurs va être en tension du fait du mauvais positionnement de la langue au repos du bébé. Cela aura des conséquences globales, au niveau de la croissance des os crâniens, principalement ceux de la mâchoire. Les tensions musculaires induites affecteront également la mobilité des vertèbres hautes cervicales, la cage thoracique, etc…
Le chiropracteur est formé pour évaluer un bébé dans son ensemble, vérifier ses capacités motrices, son développement neurologique, les restrictions articulaires et les tensions musculaires dont il peut souffrir. Le chiropracteur vérifie également la correcte intégration des réflexes archaïques qui vont s’effacer pour laisser place à une motricité volontaire.
La formation de votre chiropracteure
Bien que le diplôme de chiropracteur autorise la prise en charge des bébés, votre chiropracteure a complété sa formation en chiropraxie pédiatrique et en particulier sur la détection des freins restrictifs : frein de langue, frein de joue ou frein de lèvre.
Elle a notamment suivi une formation sur les freins restrictifs buccaux dispensés par Mme Aurélie Petitclerc, chiropracteure au Canada, formée IBCLC (conseillère en lactation), spécialisée dans la prise en charge multidisciplinaire des bébés.
Cette formation, en plus des autres, permet un meilleur abord des freins restrictifs buccaux ainsi que leurs conséquences sur le développement neurologique et moteur de l’enfant.
Informations complémentaires
En France, le Dr Caroline de Ville aborde très bien le sujet des freins restrictifs. Sur son site « au sein en douceur » vous pourrez trouver des informations générales et complémentaires à cet article. https://www.auseinendouceur.com/blog/
Le Dr Caroline de Ville explique par quelques vidéos ;
– Le bon positionnement de la langue pour une bonne formation du palais et une respiration nasale correcte https://www.youtube.com/watch?v=etED2Vp3_CE
– Comment bien réaliser des exercices pré et post frénectomie. https://www.youtube.com/watch?v=TlVXqatvcvY
Plus informel, le blog de maman lune est très bien fait pour approfondir le sujet : http://mamanlune.com/index.php/frenotomie/.
Voici un lien de son blog qui montre des exercices à faire à la maison avant et après la frénectomie : http://mamanlune.com/index.php/2020/03/24/soccuper-des-tensions-de-bebe-depuis-la-maison/
Sources : Le guide de l’allaitement naturel, nourrir son enfant en toute liberté, Ina May GaskinSéminaire de Mme Aurélie Petitclerc, chiropracteure à Terre Neuve, DC, CACCP, IBCLC. Son site internet : https://www.chirobliss.org/